Tala Madani crée des visualisations qui entretiennent un rapport avec le crime – non contre la personne mais contre l’image. Crime intellectuel, mental totalement libre puisqu’il s’agit de tuer ce qui ne se dit, ne se fait ni ne se montre: éjaculations mentales, déchets du corps. L’artiste prouve que la seule recherche féconde est une alchimie des matières fussent-elles fécales.
La vie danse par la bouillie des corps lourds et rayonnants en un hymne à l’expansion d’un épanouissement. Demeurent les couleurs qui évacuent l’âme. C’est le passage obligé choisi par Tala Madani pour rebondir afin de ne plus souffrir du réel en tant que réalité manquée lorsque le corps est séparé de lui-même et de ses fantasmes. Jaillit un rapport dynamique: il devient le moteur de l’œuvre comme de l’existence.
Les glissements opérés évoquent combien être c’est percevoir, c’est être perçu. Mais en dehors des sentiers battus. Le corps jaillit en coulées, en mirages. Il crée le trouble, contredit l’évidence toujours factice: car sa « vérité » possède une part d’imperceptible inavouable. Et ce n’est pas Georges Bataille qui aurait « dit » le contraire.
L’œuvre sort littéralement les fantasmes de la tête. Même en images fixes le corps ne possède plus l’immobilité des statues. Jaillit un spectacle impur qui casse le silence. Il est temps de pénétrer des domaines secrets où la chair devient la mèche détonnante et étonnante au milieu des éléments premiers.
Le corps s’effrite en foirades (au sens premier et scatologique du terme), rampe de délices, émerge subtilement, jaillit, disparaît jusqu’à l’épuisement. Ni le possible ou l’impossible sont encore des garde-fous. Tout est instauré en ébullition et jets. S’éprouve le creux où tout commence en une clarté qui égare mais où l’image réduit les mots au silence.