Sandra Hoyn à travers sa série photographique « Jenny’s Soul » crée la narration d’un amour entre un homme (dont le visage restera masqué) et sa poupée de latex. Ce qui pourrait donner lieu à du salace se métamorphose en superbe histoire d’amour. Les images sont sous-titrées pour montrer ce qu’un simple « matériel au service » peut apporter à un être isolé.
Cet utilisateur, ce pratiquant, l’artiste en devient le complice sans chercher à donner à sa série une quelconque malignité. Bien au contraire. Si bien que ce n’est plus l’histoire mais le monde lui-même qui devient parodie en un subtil et touchant renversement.
Exit les divagations farcesques: le jeu est sérieux et générateur d’un « carpe diem » particulier. Ce qui pourrait étonner ou devenir vecteur d’incompréhension est remplacé par le dialogue muet d’une cérémonie secrète. La photographe dans sa position d’étrangère au groupe propose une expérience liée à l’immersion dans une réalité sociale où le leurre devient le socle du dispositif créatif et où les situations sont subtilement décalées.
À l’exotisme de ce « rapport » se substitue une forme d’anthropologie qui n’a rien d’anecdotique ou de folklorique. Le langage photographique devient une confidence. Elle révèle à la fois la fois une grandeur et une misère sexuelle à travers des rituels autarciques ou égocentrés en nous mettant en relation avec une « inavouable » proximité. Le monde devient élastomère dans un clivage particulier. La photographie est capable de produire de l’inexprimable. Elle rend le néant comme l’amour plus proche et plus lointain.
Sandra Hoyn,« Jenny’s Soul », « Love Stories – Phataumnales 2016 » octobre 2016 – janvier 2017, Beauvais.