IRÈNE est un prénom comme un autre. Un prénom de femme à la sonorité délicate comme un lys, un prénom aux connotations surannées, provinciales, peut être même un peu mauvais genre comme les manèges fluos et extrêmes des fêtes foraines. Sur le web et en format papier glacé, IRÈNE est un fanzine érotique que trois jeunes filles passionnées d’érotisme féminin accessible, tactile et beau ont lancé. Nombreux sont d’ailleurs les jeunes des années 80 (environ) à se réapproprier un érotisme un peu fatigué des libertés prises en post-68 et roulées dans la boue (et le sublime) des années Internet. Citons par exemple le magazine Passion avec lequel une collaboration a produit des images belles et salaces en février dernier, histoire que la Saint Valentin soit bien lascive et non plus seulement faite de coeurs et de chocolats.
Ce qu’IRÈNE a de particulier c’est qu’il s’agit d’un hymne au corps de la femme par la femme et pas que pour la femme. Geneviève Eliard, Esthèle Girardet et Lucie Santamans sont françaises. Elles travaillent à Londres. Elles ont fondé IRÈNE en pensant secrètement au surréalisme et ont choisi l’option fanzine à cause du côté amateur et passionné, à cause de la texture que ça donnait au truc. Rassemblant poésie, photographies et collages de façon à créer des rencontres inattendues, IRÈNE cherche moins à choquer qu’à caresser l’inconscient de ses lecteurs dans le sens du poil. Parce que la sexualité, quelle qu’elle soit, est une donnée universelle de l’humain, IRÈNE cherche à produire un discours pictural de l’érotisme qui serait à la fois plaisant et source d’inspiration. Une proposition ouverte venant subtilement baisser les barrières de l’isolation moderne. Un souffle léger volontairement naïf mais très enthousiaste.
Le premier numéro d’IRÈNE ne comportait que des photographies produites par ses fondatrices. Cependant, dès le deuxième numéro, les pages s’ouvrent à l’altérité passionnée: du moment que le regard est à la fois identique et différent, que la femme est célébrée élégamment (ce qui ne signifie pas proprement). Et les propositions de collaborations se suivent et entraînent le fanzine sur la route d’un certain style jusque-là peu connu. Les images dans l’air du temps sont internationales, faites par des hommes et par des femmes – pour des hommes et pour des femmes. Elles sont belles. Elles ne sont jamais dégradantes mais au contraire enivrantes à l’image de cette brune à la peau laiteuse plongée dans son bain, une fleur passionnante à la main.
B!B!: Un fanzine (érotique), c’est un magazine pour adolescents lubriques?
Irène: Un fanzine est un magazine qui doit réveiller tous les plaisirs! Nous avons aussi choisi l’érotisme par réel intérêt, presque par passion. Nous voulions interroger ce sujet parfois ambigu, notamment grâce à un support tactile, chaleureux et efficace. Nous espérons ainsi qu’IRÈNE émoustille chacun de ses lecteurs!
B!B!: Ca veut dire quoi érotique, c’est souvent synonyme de glauque non?
Irène: Malheureusement, érotisme rime souvent avec pas grand chose! Le terme est aujourd’hui très galvaudé. Nous essayons de faire en sorte qu’IRÈNE redonne une certaine valeur à l’érotisme et affirme sa ferme distinction de la pornographie. Nous voulons apporter une nouvelle approche sur le corps féminin, sur son désir et son accomplissement.
B!B!: Comment peut-on partir du plaisir érotique et arriver à l’artistique?
Irène: C’est en effet un exercice très difficile! Nous restons toujours connectées à des références photographiques, artistiques ou justes érotiques. Nous entretenons aussi le contact avec nos followers, afin de s’imprégner de leurs goûts ou de leurs attentes. Nous y ajoutons enfin notre propre univers par le biais de notre ligne éditoriale et du support fanzine.
B!B!: Comment choisissez-vous vos contributeurs?
Irène: Nous avons réalisé seules le premier numéro. Nous avons ensuite reçu nos premières contributions, par le biais d’amis ou de photographes extérieurs. L’aventure allait commencer! Nous prenons beaucoup de plaisir à travailler à leur côté, cette étape en amont est primordiale. Chaque numéro devient une nouvelle facette d’IRÈNE, une phase de son évolution. Nous souhaitons d’ailleurs progressivement mettre plus en avant la partie « curator » du projet.
B!B!: Le choc des mots: Irène et Boum!Bang!, ça vous évoque quoi?
– Irène: Shebam! Pow! Blop! Wizz! (comme les paroles de la chanson Comic Strip que Gainsbourg écrivit pour et fit chanter par Brigitte Bardot, icône de l’érotisme à la française).
IRÈNE is beautiful.
IRÈNE is erotic.
IRÈNE is iconic.