Fabio Viscogliosi
Slapstick Melody
Du samedi 28 janvier au 25 février, la galerie Romero Paprocki présente l’exposition personnelle de Fabio Viscogliosi, « Slapstick Melody ». Ce titre évoque le son créé par les bruiteurs pour renforcer l’humour gaguesque des baffes sonores au cinéma et dans les cartoons.
Né en 1965 près de Lyon de parents italiens, Fabio Viscogliosi est un artiste pluridisciplinaire. A la fois écrivain primé et musicien reconnu, sa pratique picturale est axée sur la peinture et le dessin. Il puise son inspiration dans la bande dessinée, la littérature, le cinéma burlesque et le graphisme.
Il a exposé son travail dans des lieux tels que le Musée d’art contemporain (Lyon), le Musée des arts décoratifs (Paris), la Galerie du Jour – Agnès B. (Paris), et plus récemment à l’Intermédiathèque de Tokyo.
Il en va, chez Fabio Viscogliosi, d’une poésie de la simplification et du bricolage d’objets au sein de situations multi-spécifiques. Empreinte d’un burlesque postmoderne, où l’humour est gage d’une micro-histoire sans horizon, cette peinture est fondée sur un principe de carambolage, que l’on pourrait définir comme la traduction visuelle de ce que la linguistique appelle une figure de concaténation ou l’enchainement des termes : _A/ A_B/B_C/C_. Buster Keaton, Charlie Chaplin et Laurel et Hardy ne sont pas loin : la moindre chute ou la plus petite maladresse augurent la transformation du comique en virtuosité épistémologique ; la succession des ratés est productrice de vérité. « On a voulu faire en sorte que chaque tarte ait un sens », aurait dit Stan Laurel à propos de La Bataille du siècle (1927), phrase citée par Pierre Senges (Projectiles au sens propre, 2020) où l’auteur développe l’image du slapstick comme une surenchère de sens : l’humour se déroule et se déplie comme un raisonnement qui va en se complexifiant.
Plus encore, on relève chez Fabio Viscogliosi la même manie de changer l’objet en accessoire, de le déchoir de son utilité pour en fournir un portrait à la fois générique et potache. Et les choses et les êtres sont ici traités à parts égales comme des éléments d’un théâtre de carton-pâte qui ne dissimule en rien sa facticité. Ils s’imbriquent dans un espace tout aussi artificiel où notre adhésion est proportionnelle à la conscience que l’on a qu’il s’agit bien d’un jeu. Couleurs denses nettement séparées par des cernés noirs, assemblage de formes selon une logique sculpturale, simulations de maquettes d’architectures : c’est une peinture qui aborde les arts comme des archétypes, doués d’une personnalité au même titre que les personnages et agencés eux aussi dans une histoire sans dénouement. L’entreprise de banalisation des objets (domestiques, industriels, conceptuels) permet leur interconnexion sur la toile et au regard de glisser sur ces décors comme dans le conduit d’une machine à inventer des gestes.