Sascha sous sa cloche de verre. Sasha immergée jusqu’au cou. Sasha pleine de boue. Mais qui est réellement Sasha? Dix ans que la photographe Claudine Doury, basée à Paris, travaille sur cet état transitoire qu’est l’adolescence. Entre temps, sa  fille Sasha a grandi. Elle est devenue une jeune fille. En la suivant photographie par photographie, Claudine Doury se penche sur la face cachée de cette transition, sur ses métamorphoses et ses bouleversements. Avec sa nouvelle série Sasha, la photographe laisse de côté, pour un temps suspendu, son projet sur les rites de passage socialement orchestrés et nous fait la lecture d’un conte photographique. Sauf que cette fois-ci, on commence par la fin. La fin de l’enfance de sa fille.

Claudine Doury, SashaClaudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.

L’adolescence, un leitmotiv qui tournerait à l’obsession chez Claudine Doury? De la Crimée où elle s’est immergée dans le dernier camp d’été des enfants de la nomenklatura russe à la traversée de l’Asie centrale sur les traces d’une jeune princesse disparue il y a 4000 ans pour son projet Loulan Beauty, elle s’est fait le témoin d’un royaume impénétrable. Parce que faire un portrait de la jeunesse, c’est aussi faire « une sorte d’autoportrait » comme elle le dit elle-même. Retrouver ses sentiments à l’adolescence,  instants fugaces que nous n’avons pas su attraper. Et à bien regarder ces épreuves grands formats (86,7 x 120 cm), on finit par oublier qu’il s’agit d’un moment d’intimité entre une mère et sa fille. Ce qu’est en train de vivre Sasha, ce passage de l’enfance à l’adolescence, nous l’avons tous vécu. Il fait écho à une période de notre vie dont il nous est impossible d’en fixer la substance. En témoigne cette cloche de verre, délicate et transparente, sous laquelle Sasha aux yeux fermés et aux lèvres ourlées, se coupe du monde des adultes. Est-ce une façon de préserver son innocence et sa  pureté ou plutôt un refus d’ouvrir les yeux sur ce qu’il adviendra après?

Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.

Le doute de soi et l’incompréhension de ses sentiments amènent Sasha à se chercher aussi bien dans le territoire maternel que dans le territoire originel, celui de la forêt où l’on peut jouer à des jeux secrets. Claudine Doury crée ainsi un mouvement de balancier entre obscurité et lumière, intérieur et extérieur. À l’intérieur, le jeune fille est seule. Elle fait l’expérience de l’enfermement et du confinement, sous le poids d’une autre enfant plus jeune. À l’extérieur, toute de blanc vêtue, Sasha court et joue avec une amie. Elles se dirigent maintenant vers les eaux. La tentation d’Ophélie? La perte de l’enfance prend des accents mortuaires. Ce petit tiroir, en forme de cercueil, où Sasha a recueilli sa natte coupée est hautement symbolique. Sasha Vient de rompre un lien afin que la transformation opère. Son corps enseveli sous la terre ou sous les eaux, elle fait l’expérience « des guerres de transition. » Mais la gravité de son visage ne nous dira pas l’indicible, ce qui se passe à l’intérieur. Alors, nous restons là, à regarder ces images, frustrés à l’idée que le temps a passé.

Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, SashaClaudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.
Claudine Doury, Sasha Claudine Doury, Sasha © Courtesy La Galerie Particulière.

Claudine Doury est représentée par la Galerie Camera Obscura à Paris. Elle sera également aux Rencontres Internationales de la photographie à Arles, du 16 au 21 avril 2012, où elle animera un stage.
La photographe expose sa série de photographies Sasha jusqu’au 26 février 2012, à la Galerie Particulière à Paris.

La Galerie Particulière
16 rue du Perche
75003 Paris
01 48 74 28 40
[email protected]