Aron Demetz crée des images qui mêlent cohérence et décomposition. Elles sont à la fois métaphores du manque et figuration du plein voire du trop plein. Nous sortons du réel pour atteindre une poésie violente sans concession, manière d’agir sur le moteur de l’être et surtout ses ratés. Aron Demetz n’est dupe de rien et par effet de surface et de matière il provoque le surgissement de la profondeur humaine. Ses silhouettes rappellent que souvent l’être est la dupe consentante du jeu programmée. Aux éléments affectifs, psychologiques fait place la force de la matière. Le textile n’est plus couverture. Il devient la mise en abîme du corps, de la maladie d’être dans l’espoir peut-être d’un sursaut vital et d’une rémission du cancer existentiel qui ronge et dont la « pelure » qui s’incorpore au « vivant » devient la métaphore.
Entre préoccupations physiques et métaphysiques le créateur montre en filigrane comment l’être malade de ses doutes et de ses peurs roule à tombeau ouvert vers un suicide personnel et collectif. L’œuvre est ambitieuse, profonde, habitée de Saint Sébastien rupestres ou de science-fiction. Ils surgissent tels divers monstres hybrides « complices » de nos défaites dans un théâtre de majesté où coulissent bien des cruautés. Les œuvres accordent à Eros et surtout à Thanatos des accents impressionnants. Elles demeurent résolument des états critiques de l’humain.
Installations et sculptures n’appellent pas plus la tendresse qu’elles ne caressent les fantasmes. Chaque œuvre provoque des interrogations par les histoires qu’elles rameutent tout en signalant – par la bande – le constat du déclin de monde et de l’art lorsqu’il cultive la mollesse. Les œuvres d’Aron Demetz ont donc beau être fantomales dans leur fixité, elles secouent le regard. Au seul charme ou beauté fait place un exercice de la laideur « programmé » afin de soulever les cœurs.