Youssef Nabil est né au Caire en 1972 et vit aujourd’hui à New York. Après une formation au côté de David Lachapelle et Mario Testino, il entame sa carrière au début des années 1990 en se consacrant à la photographie avec un goût prononcé pour le portrait et l’autoportrait. Son style aisément reconnaissable repose sur des mises en scènes épurées et délicates ainsi que sur la retouche à l’aquarelle, à l’huile ou au pastel de ses clichés capturés en noir et blanc.
Enfant, Youssef Nabil visionne un grand nombre de films anciens issus du patrimoine cinématographique égyptien et tombe sous le charme de ses vedettes charismatiques qui pour la plupart sont déjà éteintes. Dès ses débuts, il tente de faire briller à nouveau les idoles de l’âge d’or du cinéma égyptien. Il commence à fixer les personnages de sa galerie intérieure, à les immortaliser dans des clichés qui rappellent les unes de magazine ou les affiches de film d’antan, sortes d’icônes profanes des temps modernes.
Au fil des années, il rencontre et travaille avec une pléiade de personnalités et d’anonymes dont il capture la beauté en suivant son propre style : un fond vierge, des cadrages soignés, une économie d’images et une atmosphère entre pudeur et érotisme. Impossible de décrire son œuvre sans parler également des couleurs, mornes et comme délavées par le temps: à certains endroits, c’est un bleu tendre qui permet à ses modèles d’atteindre le rang d’idole; plus loin, le rose, le vert, l’orange, également vieillis, sont utilisés par l’artiste pour sublimer ses vedettes, tout en effleurant le kitsch. Mais derrière ces maquillages poudrés se cachent souvent la tristesse, le doute, la nostalgie, des sentiments particulièrement présents dans les autoportraits de l’artiste « déraciné » et semblant chercher sa place dans un monde qui lui est étranger.
Et si ses autoportraits le racontent à demi-mot, ce sont surtout ses portraits de personnalités qui nous permettent de mieux rencontrer l’artiste. On retrouve ainsi dans cette collection étonnante, la chanteuse Natacha Atlas, mais aussi Catherine Deneuve, Charlotte Rampling et Fanny Ardant, comédiennes qu’il met parfois en scène de manière très cinématographique. Marina Abramovic, Tracey Hemin, Mona Hatoum, Louise Bourgeois ont également posé pour lui; des femmes artistes, charismatiques, ambitieuses et maternelles comme aime à les représenter Youssef Nabil. Les hommes ont moins souvent les faveurs de son objectif sans pour autant avoir déserté: des amants sensuels, des pêcheurs anonymes, le comédien Omar Sharif mais aussi David Lynch, John Waters ou les duos Gilbert & Georges et Pierre et Gilles. Ces derniers, à moins qu’il ne s’agisse d’un raccourci trop rapide, ont dû fortement influencer Youssef Nabil qui par son regard a su créer un univers bien à lui, entre voyage dans un passé proche mais déjà oublié et itinéraire d’un jeune homme rêveur et désorienté.
Une rétrospective baptisée « I won’t let you die » lui est consacrée jusqu’au 25 mars 2012 à la Maison Européenne de la Photographie . Cette exposition est organisée avec le soutien de la Galerie Nathalie Obadia. Un livre du même titre est également disponible aux éditions Hatje Cantz.
Maison Européenne de la Photographie
5/7 rue de Fourcy
75004 Paris