Poline Harbali est d’origine franco-syrienne. Sa pratique artistique se construit autour de la quête de son identité, chose particulièrement malaisée dans son cas puisqu’elle n’a pas d’accès direct à son patrimoine familial syrien. Comment en effet travailler autour des souvenirs de famille quand on n’en a pas? Poline Harbali commence donc par imaginer ou réinterpréter des histoires anodines, des bribes de souvenirs qui n’étaient pas les siens pour se construire une ascendance. Cependant, elle voit ses contes familiaux détruits par les évènements du Proche-Orient et de l’Afrique du nord l’an passé. Pour y faire face et reconstruire son histoire avec une matière première tangible, elle demande à un proche, habitant sur place, de lui envoyer des photographies des membres de sa famille, de leur appartement et de la ville. Photos qu’elle re-photographie et modifie par la suite pour leurs donner le ton d’un pays en guerre, de l’atmosphère qu’elle envisage.
Poline Harbali, Le Damas des autres, encre de chine, 2012 ©
Poline Harbali, Une histoire à Damas 1, photographie et illustration encre de chine, 2012 ©
Poline Harbali, Une histoire à Damas 5, peinture et encre de chine, plume, 2011 ©
Poline Harbali, Une histoire à Vichy 1, photographie et illustration encre de chine, 2012 ©
Poline Harbali, Meccano, encre de chine et plume sur photographie, 2011 ©
Poline Harbali, Jumelles, encre de chine et plume sur photographie, 2011 ©
Poline Harbali, Entrailles, encre de chine et plume sur photographie, 2011 ©
Poline Harbali, Sommeil lucide, encre de chine et plume sur photographie, 2011 ©
Poline Harbali, Autres
douceurs/François01, photographie argentique, 2010-2012 ©
Poline Harbali, Autres douceurs/Maman, photographie argentique, 2010-2012 ©
Poline Harbali, Autres douceurs/Rencontre, photographie argentique, 2010-2012 ©
Poline Harbali, Autres douceurs/Mumu et Juju, photographie argentique, 2010-2012 ©
Poline Harbali, Autres douceurs/Papa, photographie argentique, 2010-2012 ©
Ses œuvres sont issues de multiples procédés, à l’image du rapport qu’elle entretient avec ses souvenirs. Les photographies sont superposées, froissées, redessinées, imprimées sur toile transparente ou textile, brûlées au fer ou cousues mains. L’artiste, par ce travail, réinterprète l’intimité des membres de sa famille pour construire la sienne et pouvoir s’en distancier: « Je suis extérieure à tous cela, je regarde depuis la France ma famille affronter une guerre, et à l’image d’une voyeuriste ».
Le souvenir sur papier glacé d’un repas de famille, de personnes connus ou non, de rires, de sourires ou de pleurs, semble bénéfique à Poline Harbali puisqu’il lui permet de reconstruire, même subjectivement, le patrimoine tant convoité d’une famille éloignée. Seulement le travail artistique émanant de ce dernier semble apparaître à la fois néfaste à l’artiste dans le sens où la réinterprétation de ces photographies l’amène à l’errance, à la confrontation de la réelle distance existant entre deux parties de son sang. Ses œuvres présentent donc une réelle re-construction identitaire amenant à la fatalité d’une impossibilité, qu’elle définit elle-même comme « construction et dé-construction, de souvenirs absents ou inconnus qu’[elle]tisse pour mieux les découdre ».