Une maîtrise de la couleur à la Lucian Freud, un traitement de la lumière emprunté à la renaissance et une solitude des sujets que l’on pourrait rapprocher de celle chère à Edward Hopper: le travail de Nushka est à mi-chemin entre figuration et abstraction mais tente toujours de proposer une interprétation de la beauté, de l’émotion.
Sa maîtrise technique est le fruit de deux années d’apprentissage aux cotés de Zawacky, un peintre américain originaire de Detroit. Pour la couleur, Nushka plébiscite Maggie Siner qu’elle considère comme son mentor. Et c’est vrai qu’à bien l’observer, on reconnait une texture, un geste spontané et rapide qui saisit l’émotion dans l’instant. L’étonnement provient également des matières et des reliefs qui convoquent à la fois Duchamp (et son nu descendant l’escalier de 1912) ou Modigliani (avec ses portraits aux yeux mystérieux).
Si on jette un coup d’œil furtif à plusieurs œuvres, l’histoire de l’art du XXème siècle se déroule puis s’efface derrière un travail qui, finalement, parvient à s’affirmer. Le relief est mis en avant par de nombreux clairs obscurs mais également par une gestuelle qui rappelle l’application au couteau.
Quand on lui demande d’expliquer sa démarche, elle se reconnait dans la description suivante: « Ses toiles montrent et représentent de multiples facettes d’un seul et même sujet : la beauté voilée, distante et intouchable. Le spectateur est toujours appelé au plus près de l’émotion de l’artiste et froidement tenu à l’écart, un mouvement qui caractérise toutes ses séries et reflète sa propre personnalité ».
Qu’il s’agisse de portraits ou de scènes, l’univers de Nushka a quelque chose d’intemporel. Les visages pourraient être ceux des danseuses de Montmartre pendant les années folles à moins qu’il ne s’agisse des traits des muses actuelles de Nushka… Entre aplats et reliefs, ombres et lumières crues, Nushka ne choisit pas. C’est précisément ce refus qui donne du caractère à ses toiles.
Elle frôle le classicisme, caresse la figuration, effleure l’abstraction pour finalement proposer une vision personnelle de ses modèles. Les images semblent s’effacer à cause de la lumière, les regards des sujets n’en sont pas moins pénétrants et dégagent une sensualité enveloppante. Cette sensualité, Nushka l’a apprise d’un autre peintre: Hashpa qui l’a initiée au nu et à la composition.
Finalement son travail s’étire entre plusieurs influences. Il y a la peinture américaine bien sûr, avec des références, peut être inconscientes, à Edward Hopper. Comme chez le maître, les personnages de Nushka sont toujours seuls: seuls dans la composition, seuls dans la couleur aussi. Cette solitude les rend inaccessibles et leur offre des contours de fantômes évanescents. Mais grâce à la sensualité, qui n’est en rien absente des compositions, la toile devient intime, aucune froideur ou drame ne semble s’y être joué.
Nushka n’est pas seulement artiste. Elle a suivi des études à Science Po Paris avant d’être diplômée de la prestigieuse école de commerce HEC. Un parcours hors norme donc, pour une créatrice qui semble ne pas parvenir à étancher sa soif de connaissances. Le dualisme entre figuration et abstraction trouve peut-être ses racines dans ce profil aussi atypique qu’attrayant.