Le monde de la planche à roulettes n’a pas fini de nous surprendre par sa créativité artistique. La quête perpétuelle du skateur pour des nouveaux spots et des nouveaux tricks le place en position de recherche systématique. D’où la faculté quelque peu extralucide de voir un monde dans un monde, de superposer les différents horizons et de garder l’oeil rivé sur le kaléïdoscope.
Ces sentiments affluent en masse lors de la contemplation de l’oeuvre du jeune Nils Inne, qui n’hésite pas à multiplier les supports utilisés et à superposer les univers qui lui plaisent afin d’en créer de nouveaux. Si l’on reconnaît du premier coup d’oeil La Cène ou encore Guernica, une observation dans le détail nous amène à nous questionner sur des sens nouveaux à ces oeuvres. Sens révélés par l’utilisation de couleurs pop, et la construction d’une mythologie propre, peuplée d’êtres et d’objets bien réels, mais déconstruits jusqu’à l’onirique.
Nils Inne, La Cène, 195×114 cm, peinture acrylique sur toile © nils 2011
Nils Inne, La Cène, détail, 195×114 cm, peinture acrylique sur toile © nils 2011
Nils Inne, Gerniskate, Gerniskate n°4, 146×88 cm, peinture acrylique sur toile © nils 2011
Nils Inne, Gerniskate, détail, Gerniskate n°4, 146x88cm, peinture acrylique sur toile © nils 2011
Il existe dans l’ensemble se ses travaux comme une constante, un mécanisme de superpostion. Est-ce que cela viendrait naturellement par habitude de visualiser un trick avant de le rentrer sur un spot? Est-ce que ce phénomène émane d’une obstination à vouloir fusionner ses deux grandes passions, skateboard et création artistique? Si ces questions demeurent en suspens, on ne peut toutefois s’empêcher de regarder de très près ses tableaux pour y trouver des réponses.
Nils Inne, Vitrail Acidulé, 150x110cm, peinture acrylique sur toile © nils 2012
Nils Inne, Organiskate ©
La notion de proximité évoquée ci-dessus peut rapidement s’avèrer comme une nécessité, afin de réussir à capter les détails et les textures des tableaux, bien souvent de grands formats. Les influences ne sont en rien masquées, ce qui ne nous prive pas d’une vaste sensation de fraîcheur et de nouveauté. Ainsi, quand la volonté de déconstruction du portrait se mêle à celle du DIY de la création de parks, cela nous donne une série de tableaux puissants, énergiques et débordants de motivation.
Nils Inne, Mr Spot, 122x60cm, peinture acrylique sur toile © nils 2012
Nils Inne, La Femme Spot, 130×90 cm, peinture acrylique sur toile © nils 2011
Mais une fois le regard éclairé par la beauté de ces contrastes, comment revenir à un mode de fonctionnement normal de la rétine? Certains photographes diront qu’ils ont l’oeil ouvert à f/1.7, tellement habitués à voir apparaître un bokeh en arrière-plan de leurs sujets. Il est alors possible de se demander comment ce jeune artiste voit le monde réel au jour le jour. On se dit quand même que les couleurs du monde actuel doivent lui paraître bien ternes, et que l’envie de le repeindre à sa manière doit quelque peu le démanger. D’où l’appropriation de maisons abandonnées pour les transformer en utopies dans le sens littéral du terme: des lieux qui n’existent pas, des propriétés inhabitées.
Nils Inne, Tolosa, FIVE-O Tolosa -Espagne © CLG 2011
Nils Inne, Propriété Inhabitée, Exposition « Sauvage », Anglet. En collaboration avec Xabier XTRM. Décoration d’une maison abandonnée et mise en scène à Anglet © Photos: Jérémy Hugues, Xabier XTRM et Nils
Nils Inne, Propriété Inhabitée, Exposition « Sauvage », Anglet. En collaboration avec Xabier XTRM. Décoration d’une maison abandonnée et mise en scène à Anglet © Photos: Jérémy Hugues, Xabier XTRM et Nils
Nils Inne, Propriété Inhabitée, Exposition « Sauvage », Anglet. En collaboration avec Xabier XTRM. Décoration d’une maison abandonnée et mise en scène à Anglet © Photos: Jérémy Hugues, Xabier XTRM et Nils
Nils Inne, Propriété Inhabitée, Exposition « Sauvage », Anglet. En collaboration avec Xabier XTRM. Décoration d’une maison abandonnée et mise en scène à Anglet © Photos: Jérémy Hugues, Xabier XTRM et Nils
Impossible de parler de Nils Inne sans aborder les planches à roulettes car elles ont marqué toute son existence. Aujourd’hui, il les décline en loupes, en puzzles, en chevaux ou en lance-pierres. Le travail du bois se fait au même titre que celui de la toile: avec patience et soin. Il en résulte des réalisations empreintes d’une grande luminosité, portées au rang de précieuses par la noblesse du bois. Et toujours cette superposition, cette faculté à déposer un calque surréaliste sur le monde qui nous entoure. Il n’y a qu’une loupe, mais il est difficile de ne pas voir le skate qui la compose.
Son talent n’a échappé à personne et ne se limite pas à un champ d’action local vu qu’il a déjà collaboré avec le célébrissime Shepard Fairey, créateur de la campagne Obey the Giant, pour un accrochage dans la boutique-galerie Ok Daddy à Bordeaux.
Nils Inne, Loupe, Loupe en bois uniquement réalisée à partir de planches de skate poncées, redécoupées et assemblées, hauteur 20cm ©Nils Inne, Fronde, lance-pierre uniquement réalisé en planches de skate. Peinture acrylique et vernis, environ 30cm de haut ©
Nils Inne, Hood pour reflex, Poignée pour appareil photo/vidéo, conçu par Rekiem Skateboards en collaboration avec Jeremy Hugues. Uniquement réalisée en chutes de planches Rekiem ©
Nils Inne, Skateboard Custom ©
Nils Inne, Skateboards custom ©
Nils Inne, Fukushima, skateboard custom ©
Nils Inne, Fukushima, SurfBoard, détail ©
Nils Inne, OK Daddy, Obey exposition ©
Nils Inne, OK Daddy, Obey exposition ©
Nils Inne, OK Daddy, Obey exposition ©
Beaucoup de lignes ont déjà été écrites à son sujet et l’on ne peut que s’en réjouir, car son travail est porteur d’espoir pour toute une scène artistique alternative. On peut suivre son activité via son site internet http://www.nilsinne.com et le blog qui y est associé… à bons entendeurs!