Né en 1961 à Los Angeles, Mark Bradford est un artiste plasticien qui propose une pratique plastique oscillant entre peinture et collage, entre abstraction et expressionnisme. Dans ses « toiles-collages », il utilise la peinture tout en intégrant des matériaux issus de la vie quotidienne et de l’environnement urbain – papiers ou tissus, lambeaux d’affiches publicitaires, cordes, matières synthétiques, grillages ou fils de fer – souvent détournés de leur usage premier. Cette pratique propose une hybridation frappante entre un art volontiers abstrait et conceptuel et la culture populaire. Il mène en parallèle une activité de styliste, celle-ci nourrissant de l’intérieur son œuvre plastique (les chutes de tissus lui servent par exemple pour ses toiles) tout comme cette dernière alimente en retour la grammaire de son style.
© Mark Bradford
© Mark Bradford
.© Mark Bradford
Mark Bradford s’intéresse tout particulièrement aux connections, aux réseaux et aux flux, à la façon dont les communautés et les êtres communiquent et partagent un même espace vécu, et propose ainsi des représentations topographiques ou en relief, des vues aériennes, des abstractions cartographiques et des paysages urbains. Un langage parfois très proche de celui de Guillermo Kuitca. Chacune de ses œuvres est en effet composée de lignes et de plans, réduisant la peinture à une pensée minimale de la ligne et de la forme. Des linéaments qui se font parfois entailles et cicatrices. C’est que l’explosion des liaisons et des croisements entre les espaces et les hommes, qui caractérise la globalisation du monde contemporain, n’efface pas de profondes fractures, voire en génère. La ligne du dessin devient alors frontière. Le grillage, clôture carcérale autour de la toile. La violence, perçue ou exprimée, est en effet bien présente dans certaines de ses œuvres et dans sa démarche, en témoignent les titres de toiles comme The Devil is Beating his Wife, Kryptonite ou Scorched Earth. Cet ancrage politique et géographique se développe dans un expressionnisme abstrait héritier notamment des travaux de Robert Rauschenberg.
© Mark Bradford.
© Mark Bradford, When we ride, Mixed media, collage on canevas (2006).
© Mark Bradford accompagné de l’un de ses assistants, en train de nettoyer à la main Kingdom Day lors de la Biennale de Séoul en 2010.
Cette pratique hybride issue de l’arte povera et cette pensée politique du monde ne sont pas sans rappeler l’œuvre de l’artiste sud-africain Moshekwa Langa qui travaille, lui, à partir de la mémoire de l’Apartheid et de ses fractures spatiales en mêlant collages urbains et abstractions cartographiques prolongeant lui aussi une réflexion initiée par Pietr Mondrian. Mark Bradford propose ainsi un art abstrait violemment inscrit dans le monde contemporain en proposant cet art de l’hybridation, entre peinture et collage, entre arte povera et abstraction conceptuelle, entre formes et réseaux. Des toiles aux dimensions souvent monumentales (plus de trois mètres) et d’une grande force esthétique. Il expose actuellement à Los Angeles, Boston, Chicago et Londres et a participé à la Biennale de São Paulo en 2006.