Sous un ciel gris et bas se détache la silhouette composite d’une friche industrielle: hangars, bâtiments préfabriqués, silos, tuyaux, échafaudages. Une présence.
Marion Tivital le dit elle-même: « J’aime peindre des sujets ingrats, révéler la beauté là où l’on ne l’attend pas. ». Ses sites industriels, à la fois familiers et inquiétants, relèvent de ces sujets inattendus pour la peinture de paysage.
Marion Tivital les aime, les croque, les photographie sur place, pour, dans le creux de son atelier, les adoucir, les caresser du pinceau encore et encore, appliquant plusieurs couches de peinture sur des surfaces de toile ou de bois, travaillant la matière et l’harmonie douce des couleurs. La lumière cotonneuse de Marion Tivital enveloppe, adoucit les ombres et les contours.
Dépouillés de leurs détails utilitaires, de leur violence, ses usines et débarcadères n’évoquent plus le labeur ouvrier, ou la blessure faite au paysage. Ils ne sont plus que des formes, dans un temps et un lieu suspendu, sans référence. Marion Tivital se garde bien d’ailleurs de leur donner un titre qui permette de les situer, dans une région et son histoire. Ils ne sont que des « paysages industriels » scrupuleusement numérotés. Sa démarche peut faire penser au travail de Bernd et Hilla Becher en photographie.
Là où d’autres artistes répondent par la violence à l’angoisse d’un monde industriel à l’abandon, Marion Tivital, elle, répond par la mélancolie, le mystère. Nulle dénonciation d’une réalité sociale difficile ; la dimension quasi-abstraite de ses peintures se charge de dire la solitude, le doute, la nostalgie.
La même intensité se dégage des natures mortes, réunies dans la série « Plastiques », même recherche de la composition quasi-architecturale, même harmonie des couleurs, révélées par une lumière paisible, même valeur esthétique inattendue des flacons disgracieux qui peuplent notre quotidien.