Un entretien Boum! Bang!
Gitane sur Gitane, ambiance apéro. C’est ainsi que tout a commencé. Mais attention: entre second et millième degré, Léo Dorfner c’est du sérieux! On a commencé… tout à l’envers!
Léo Dorfner, portrait © photo: Enguerran Ouvray
B!B!: Si je te dis Boum! Bang! que réponds-tu?
Léo Dorfner: Ejac’ faciale!
B!B!: Quels sont tes origines et ton cursus?
Léo Dorfner:Je suis né dans le 13ème arrondissement un 25 décembre, comme Jésus (Coïncidence? Je ne crois pas!). J’ai été conçu dans l’immeuble même où l’on se trouve, vers Maison Blanche, comme Barack Obama (Coïncidence? Je ne crois pas!). Je suis un pur urbain, la nature ça me fait paniquer et les animaux sont faits pour être mangés. Après les Beaux-Arts de Caen (fallait bien voir la province!) j’ai continué mon cursus aux Beaux-Arts de Paris.
B!B!: Qu’est ce qui t’a mené au monde de l’art et des images?
Léo Dorfner:Les tortues Ninja! Plus sérieusement, la BD, Raymond Pettibon, Joan Miró, Andy Warhol, le Rock ‘n’ roll, le cinéma, Lars Von Trier, la beauté nietzschéenne de « 2001 l’odyssée de l’espace », film qui m’a fait ressentir un véritable syndrome de Stendhal.
B!B!: Quelle est ta position face à l’Église Catholique et pourquoi récupères-tu son iconographie?
Léo Dorfner: Ma religion c’est plutôt le PSG. Si les gens pensent qu’il y a un souffle de blasphème dans mes œuvres, tant pis! Je récupère cette esthétique pour son élégance et parce que l’art occidental y tient ses racines. C’est donc d’un point de vue esthétique que je me suis dirigé vers cette iconographie. Mais je crois que j’aurais aimé être juif.
Léo Dorfner, Music Non Stop Brutus Rock, Pointe posca sur héliogravure, 22,5×15,5 cm ©
Léo Dorfner, Music Non Stop Brutus Rock, Pointe posca sur héliogravure, 22,5×15,5 cm ©
Léo Dorfner, Music Non Stop Brutus Rock, Pointe posca sur héliogravure, 22,5×15,5 cm ©
Léo Dorfner, Music Non Stop Brutus Rock, Pointe posca sur héliogravure, 22,5×15,5 cm ©
B!B!: Quelle est ta perception du monde?
Léo Dorfner: Euh t’as 24h devant toi? En revanche le monde de l’art me rend assez misanthrope, m’oblige à me mettre dans la peau d’un personnage. Au Beaux-Arts je ne me suis pas fait beaucoup d’amis, j’allais en cours en costard-cravate, ce qui détonait avec tous les hippies et autres branleurs présents sur les lieux. J’aime me différencier si ce n’est être différent.Par ailleurs, je suis le directeur artistique d’un webzine culturel qui s’appelle Branded et qui va révolutionner le monde.
B!B!: C’est quoi être « jeune artiste » de nos jours à Paris?
Léo Dorfner: T’as 48h devant toi? C’est cool même si ce n’est pas toujours évident matériellement. J’ai tendance à plus idéaliser la bohème du XIXème que celle que l’on vit en ce moment. Enfin, être artiste ne me semble jamais vraiment être un choix. Je ne pense pas que j’aurais pu faire autre chose. Et je reste simple: je suis peintre. J’ai vite horreur de l’art conceptuel post-duchampien, ça m’énerve. À vrai dire je trouve ça ringard, plus exactement conservateur. C’est la voie la plus simple, où l’on peut faire illusion le plus longtemps, avec l’assentiment de journalistes/critiques/curators plus mongols les uns que les autres. C’est un sujet délicat le jugement que l’on porte sur une oeuvre d’art, autrement dit, qu’est qu’une bonne oeuvre d’art? Certainement pas ce qu’on nous inflige depuis trop longtemps, qui n’est beau ni formellement, ni intellectuellement, et qui n’est plus novateur.
Léo Dorfner, Aurélie convertissant Théodose, aquarelle sur papier, 100×150 cm, 2012 ©
Léo Dorfner, L’étrange similitude entre le principe de plaisir et l’utilisation violente d’une hache, aquarelle sur papier, 150×100 cm, 2012 ©
B!B!: Si tu n’avais pas été artiste?
Léo Dorfner: J’ai fait un bac scientifique, alors j’imagine que j’aurais fini dans une fac de physique-chimie. Ennuyeux!
B!B!: Parles nous des différents médiums que tu utilises?
Léo Dorfner: La photographie numérique et polaroïd, le dessin et l’aquarelle. D’ailleurs je commence à faire preuve d’une certaine maitrise avec cette technique. Je travaille d’après mes photos. L’aquarelle est une technique instantanée contrairement à l’huile. C’est un challenge complexe, les retours en arrière ne sont guère possibles. Et surtout c’est un médium inhabituel pour les thématiques que j’aborde et les formats que j’entreprends, ça permet de casser les frontières et les clichés de paysages aquarellés bien proprets! J’aime brosser des portraits avec rapidité, je m’attarde surtout sur les regards, d’ailleurs, je commence toujours par les yeux et finis par les oreilles.
Léo Dorfner, Sans titre, photographie argentique, 8,5×10,8 cm ©
Léo Dorfner, Sans titre, photographie argentique, 8,5×10,8 cm ©
Léo Dorfner, Et perdre mon coeur dans les sables brûlants, aquarelle sur papier, 50×40 cm ©
Léo Dorfner, Spitzenqualität, aquarelle sur papier, 50×40 cm ©
B!B!: Tu sembles plus attaché à la représentation de la figure humaine qu’au paysage, que peux-tu nous en dire?
Léo Dorfner: J’aime le corps, les visage, la peau. Les paysages ne m’intéressent pas pour l’instant, je n’éprouve pas le besoin de conceptualiser mes portraits.
B!B!: Et à propos de tes tatouages et des tatouages que tu dessines sur tes œuvres?
Léo Dorfner: Je suis très « corporate » alors j’ai les initiales de la Galerie ALB-Anouk Le Bourdiec et le nom de l’expo « Vivre dans la peur » qui s’est terminée le 8 mars 2014. Mais aussi la hache parce que c’est un objet que je trouve élégant qui tranche avec sa violence et qui a permit à l’humanité de se défendre et de se sustenter. J’aime tatouer de vieilles gravures pour l’anachronisme et l’esthétique, encore et toujours. Certaines personnes aussi se sont fait tatouer certains de mes dessins, c’est flatteur et ça donne une autre dimension, charnelle et en mouvement, de ces images. Le tatouage aussi a été un des moyens de me faire travailler la typographie. Bref il y a un jeu d’aller-retour entre le papier et le corps, la tête et la peau… Ça me plaît! Et puis il y a toutes les références au Rock ‘n’ Roll dans lequel j’ai été élevé et qui sont des leitmotive: les Velvet Underground, les Rolling Stones, Kraftwerk et aussi un poème de Michel Houellebecq.
Léo Dorfner, Dans un brouillard de plomb, la peur au fond des yeux, aquarelle sur papier, 65×50 cm, 2013 ©
Léo Dorfner, L’indifférence des nuages nous ramène à nos solitudes, aquarelle sur papier, 130×90 cm, 2013 ©
Léo Dorfner, La platitude de la mer dissipe le désir de vivre, aquarelle sur papier, 75×60 cm ©
B!B!: Comment « sens-tu » ou imagines-tu l’évolution de ton art?
Léo Dorfner: Je refuse de m’enfermer dans un concept. Ma pratique est libre et peut ainsi se définir d’elle-même. Je n’ai pas de message non plus. Ce sont les images et l’esthétique qu’elles dégagent qui m’intéressent, leur mixité entre « grand art » et culture populaire.
B!B!: Tes projets à venir?
Léo Dorfner: Diverses expos et toujours rester au sein de la Galerie ALB-Anouk Le Bourdiec. Ainsi que quelques acquisitions par l’Artothèque de Caen.
Léo Dorfner, La mort est un commerce inéquitable où l’on troc de fragiles illusions pour d’indicibles certitudes, pointe posca et feutre sur magazine, 28×21 cm ©
Léo Dorfner, La meute, Pointe posca et feutre sur magazine, 28,5×21 cm ©
Léo Dorfner, La rete della malinconia, pointe posca et feutre sur magazine, 26 x 20 cm ©
B!B!: Ton caractère en fonction des 7 pêchés capitaux: Es-tu colérique?
Léo Dorfner: Non.
B!B!: Gourmand?
Léo Dorfner: Non. (Mensonge! Il aime beaucoup trop le whisky japonais!)
B!B!: Avare?
Léo Dorfner: Non, définitivement.
B!B!: Paresseux?
Léo Dorfner: Non plus, surtout quand une expo est en préparation!
B!B!: Enclin à la luxure?
Léo Dorfner: Of course!
B!B!: Envieux?
Léo Dorfner: Non.
B!B!: Orgueilleux?
Léo Dorfner: Penses-tu!
B!B!: Ton dîner des Titans?
Léo Dorfner: Gainsbarre et Charles Bukowski qui ramèneraient l’alcool, Jésus pour la multiplication des pains, Oscar Wilde et Michel Houellebecq pour la légèreté des sujets de conversation et Joan Crawford en guise de dessert!
B!B!: Quelle serait ton épitaphe?
Léo Dorfner: : « My life was saved by Rok ‘n’ Roll ».