Un crayon, de la colle, des ciseaux et un ordinateur suffisent pour que Laurindo Feliciano, illustrateur et graphiste brésilien installé à Paris, matérialise ses inspirations et obsessions dans des collages évocateurs. Née à Belo Horizonte, en 1980, l’artiste commence par dessiner et interpréter ce qu’il voit en utilisant des techniques et supports variés, s’amusant à rechercher la multiplicité pour arriver à représenter ses passions et frénésies personnelles. Il décide de se rendre à Paris en 2003 dans le but de poursuivre ses études de design et d’architecture, apprenant les étapes spécifiques de création particulièrement bénéfiques pour son travail artistique, avant de se consacrer pleinement à l’art et à l’illustration à partir de 2009.
Ses œuvres s’inspirent grandement de la philosophie, de l’histoire naturelle, du comportement animal, des formes organiques, des beaux arts, de la sémiotique, des livres antiques, des films, de la musique, mais également de sa famille et de ses amis. C’est par l’assemblage de diverses images de livres et magazines consommés, cartes postales jaunies, lettres anciennes et objets aléatoires, premièrement dénués d’utilité, que Laurindo Feliciano cherche à interpréter les ressorts de la mémoire humaine. Une image ou un mot anodin, placé avec d’autres, dans un contexte spécifique devient significatif, de manière à ce que le signifiant s’éloigne du signifié premier, pour avoir une toute autre interprétation, une nouvelle définition permettant à l’artiste de recréer un monde imaginaire, de provoquer des rencontres insolites.
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Les collages surréalistes de Laurindo Feliciano suggèrent de nouvelles associations visuelles, poétiques et oniriques, ce qui les différencie des assemblages cubistes voués à la seule recherche plastique ou des photomontages politiques du dadaïsme allemand. La combinaison d’éléments séparés de toute nature et de toute logique, permet à l’artiste de créer un monde irréel, comme s’il était dénué « de tout contrôle exercé par la raison, en dehors de toute préoccupation esthétique et morale », selon André Breton, Manifeste du surréalisme. L’inconscient devient alors le nouveau matériau du créateur d’image: un lion au corps tranché souffle sur un arbre pour y faire tomber l’aigle, James Dean se retrouve la tête scalpée par des feuillages et l’Ipad est propulsé dans le passé. Les dires de Jacques Prévert, collent parfaitement aux travaux de l’artiste : « Le mot image veut dire ce qu’il veut dire, ce qu’on lui fait dire, aussi bien ce que les gens ont appelé une métaphore: c’est un mot un peu drôle, un peu savant, comme une figure ou un visage de rhétorique, toutes ces choses ont des noms ! Mais du moment qu’on écrit avec de l’encre ou un crayon, on peut faire des images aussi, surtout comme moi, quand on ne sait pas dessiner, on peut faire des images avec de la colle et des ciseaux, et c’est pareil qu’un texte, ça dit la même chose ».