« Mes images sont fragiles; Je ne les ai jamais vues, mais je sais qu’elles existent et certaines m’ont beaucoup ému. »
Evgen Bavcar est un photographe naturalisé français, né en 1946 en Slovénie. Il devient aveugle vers l’âge de douze ans, perdant son œil gauche, puis son œil droit dans deux accidents successifs. Il commencera à pratiquer la photographie d’art quatre ans plus tard. Diplômé en philosophie, il exerce aujourd’hui au sein de l’Institut d’esthétique des arts contemporains (IEAC) d’où il a souvent l’occasion de s’exprimer sur le statut de l’image.
Pour réaliser ses photos, Evgen Bavcar dépend des autres, des médiateurs qui lui décrivent ce qu’il a devant lui. Il utilise l’autofocus de son appareil Leica pour la mise au point mais peut aussi évaluer, à l’oreille, la distance qui le sépare de son modèle. « Je sais qu’il y a des choses qui m’échappent, mais c’est vrai aussi pour les photographes voyants. ». La photographie numérique est pour lui un allié pratique, mais également théorique: un appareil numérique est quelque part un peu « aveugle ». Il enregistre un visible immatériel, contrairement à la photographie analogique qui fixe le réel dans la matière sensible de la pellicule, comme sur la rétine.
Les reflets de l’eau © Evgen Bavcar
Autoportrait penché © Evgen Bavcar
Nu aux mains © Evgen Bavcar
Portail avec des hirondelles © Evgen Bavcar
Barcelone © Evgen Bavcar
Pompéi © Evgen Bavcar
Nu © Evgen Bavcar
Bicyclette aux hirondelles © Evgen Bavcar
Nu à la lanterne © Evgen Bavcar
Portrait aux peintures © Evgen Bavcar
Deux nus aux hirondelles © Evgen Bavcar
Shot against time © Evgen Bavcar
Portrait aux mains © Evgen Bavcar
Arbre avec des hirondelles © Evgen Bavcar
Nu © Evgen Bavcar
La démarche d’Evgen Bavcar est avant tout philosophique et conceptuelle. « Je suis le degré zéro de la photographie. Disons que je suis plus un iconographe qu’un photographe ». Son travail fait référence à toute une philosophie de l’image, comme représentation de l’invisible : de l’icône représentant la divinité, aux origines du portrait comme conjuration de l’absence, telle que le rapporte le mythe de Butadès (Butadès, potier de Corynthe, réalisa pour consoler sa fille du départ de son amant, le profil en terre cuite de celui-ci à partir de son ombre dessinée sur le mur). Les exercices du portrait et du nu photographiques sont d’ailleurs fondamentaux chez lui, et correspondent à une situation philosophique et psychanalytique très forte : le regard à sens unique du modèle vers un œil photographique sans vision, sans écho remplace le dispositif habituel du portrait empreint de narcissisme et de désir.
Evgen Bavcar conçoit ses photographies comme le reflet visible d’un miroir intérieur, ce qu’il appelle le troisième œil, un regard qui désire l’image au point de vouloir la posséder, sans avoir besoin de la voir physiquement. « Je photographie ce que j’imagine, je suis un peu comme Don Quichotte. Les originaux sont dans ma tête. Il s’agit pour moi de fabriquer une image mentale, l’enregistrement physique qui représente le mieux ce que j’imagine. ».
Comme pour preuve, ses photographies sont souvent des images nocturnes, arrachées partiellement à l’obscurité, par l’usage de projecteurs. La lumière et l’ombre, les données les plus fondamentales de l’image, sont mises en valeur par l’usage exclusif du noir et blanc. Les thèmes intemporels et oniriques empruntent leurs références au surréalisme (les hirondelles de Magritte, la surimpression cadavre-exquis) et au symbolisme (mystères sacrés et Antiquité enfouie).
Hanna Schygulla © Evgen Bavcar
Véronique et le canard © Evgen Bavcar
Genève avec un aigle © Evgen Bavcar
Genève et les étoiles © Evgen Bavcar
Paris et le chat © Evgen Bavcar
Ljubljana et le dragon © Evgen Bavcar
Le Moïse de Michel-Ange et un manuscrit © Evgen Bavcar
Tête de Caligula, Naples © Evgen Bavcar
Evgen Bavcar vit aujourd’hui à Paris. Son travail est reconnu et récompensé internationalement.