En regardant les tableaux du peintre anglais Antony Micallef, on devine aisément d’où lui vient son surnom de « Bacon in Disneyland ». Stimulé par l’impact de la culture contemporaine et de la société de consommation, Antony Micallef établit une dichotomie où Homme et culture pop cohabitent dans un rapport schizophrénique régi par la séduction.
À travers des images publicitaires moqueuses, émergent d’horribles visions de la mort. Dans « I shit Diamonds », une femme, accroupie de façon obscène sur une pluie de diamants, est entourée de monstrueuses colonnes vertébrales et est couverte d’un voile funéraire de peinture blanche. L’oeuvre « Sweet Paris » est habitée par des fumeuses explosions anthropomorphes où l’arc-en-ciel est un prétexte à la dénonciation des multinationales productrices de cigarettes.
© Antony Micallef, 21st Century love, huile, acrilyque et fusain sur toile, 140 x 140 cm
© Antony Micallef, I shit diamonds, huile, acrylique, resine, rouge à lèvres et papier sur linen, 144 x 144 cm
© Antony Micallef, Sweet Paris, huile, acrylique, resine, rouge à lèvres et papier sur linen, 144 x 144 cm
© Antony Micallef, Little tiny kisses, huile et feuille d’or sur linen, 140 x 140 cm
© Antony Micallef, Self portrait, on earth as it is in heaven, huile, fusain, acrylique et resine sur linen, 144x 84 cm
Antony Micallef combine peinture à l’huile et collage afin de juxtaposer des images glamours de la culture pop à des figures humaines. Si à première vue le travail d’Antony Micallef peut sembler la fusion très réussie d’un héritage baconien et d’un penchant pour les arts graphiques, d’autres influences transparaissent: on peut ainsi y reconnaître le goût pour la gestuelle et le noir et blanc de John Virtue et la sensibilité profonde pour les visages souffrants de Frank Auerbach.
© Francis Bacon, Portrait of Isabel Rawsthorne, huile sur toile, 1966
© John Virtue, Landscape No. 739, 2004
© Frank Auerbach, Head of J.Y.M., 1981
Ces influences nous permettent de mieux comprendre la mutation de ses sujets. Ce qui semblait n’être qu’un jardin fleuri de roses rouges se transforme sous nos yeux, en un corps ruisselant de sang. L’Homme, au contact avec la société contemporaine, est maintenant devenu un monstre. Le terrible Minotaure du mythe grec, dépourvu de toute acception mythique, se manifeste dans sa brutale réalité, prisonnier inconscient du labyrinthe iconographique de la culture pop. Ce contraste violent avec la culture ancienne est représenté également sur « Study of Icarus » où le personnage représenté après une combustion, apparaît comme un gisant avec un masque funéraire.
Antony Micallef, Bestial descent, huile, fusain et feuille d’or sur linen, 80 x 100 cm
© Antony Micallef, Study of Icarus, huile sur linen, 100 x 100 cm
© Antony Micallef, Persephone reborn, huile et fusain sur linen, 90 x 90 cm
© Antony Micallef, Abduction of Persephonem, huile sur linen, 140 x 90 cm
© Antony Micallef, The adoration of fools, huile, papier, feuille d’or et resine sur linen, 151 x 101 cm
Dans certaines de ses œuvres, Antony Micallef applique sur la toile une fine feuille d’or, qui est ensuite absorbée par de vives et choquantes couleurs pop. Ciel cosmique des byzantins, place de l’Intelligible, l’or représente la perfection que l’homme pouvait atteindre à travers la spiritualité. La lente décomposition de cette matière noble sur les toiles du peintre anglais résonne lourdement comme une interdiction de toute transcendance à l’Homme. Dans « The Offering », l’Homme devient un morceau de viande, une Meat Head, et le visage se désagrège dans une cruelle gestuelle enragée et indéfinie.