James Nachtwey a probablement couvert la majorité des conflits de ces trente dernières années. Il souhaite révéler comment, dans un contexte difficile, l’utilisation de la photographie peut déclencher une réelle prise de conscience et une véritable relation aux autres. Il offre au spectateur, des photographies authentiques et exigeantes. Alors que le danger et la peur peuvent en éloigner certains, James Nachtwey se retrouve toujours au centre des combats et des exécutions. Au risque de sa vie, il défend son médium comme un élément incontournable de la communication. Il est considéré comme l’un des plus grands photographes de guerre de notre époque.

« J’ai été un témoin, et ces images sont mon témoignage. Les événements que j’ai enregistrés ne doivent pas être oubliés et ne doivent pas être répétés ».

James Nachtwey, Autoportrait© James Nachtwey, Autoportrait

James Nachtwey est né en 1948, à Syracuse, dans l’état de New-York. Il étudie l’Histoire de l’Art et les Sciences Politiques dans une prestigieuse université américaine. Puis, influencé par certaines images de la guerre du Vietnam et par le mouvement des droits civiques américains, il décide de faire carrière dans la photographie. Il sera d’abord assistant d’un rédacteur d’actualités chez NBC puis photographe local au Nouveau-Mexique. En 1980, il retourne à New-York pour devenir photographe indépendant. Il a en même temps travaillé pour l’agence Black Star, de 1980 à 1985, époque où il assistera à la guerre civile en Irlande du Nord. Ce reportage fut un tremplin pour sa carrière: « en 1981 je suis allé en Irlande du Nord, 10 prisonniers de l’IRA étaient en train de faire une grève de la faim jusqu’au bout pour protester contre les conditions de détention. La réaction dans la rue était une confrontation violente. J’ai vu que les fronts des guerres contemporaines n’avaient pas lieu sur des champs de bataille isolés, mais précisément là où les gens vivaient ». Depuis cet instant, il se consacre à des guerres, des conflits ainsi qu’à de graves problèmes sociaux. Le photographe réalise un véritable tour du monde de « l’Enfer » dans le but de documenter toutes les situations difficiles dans de nombreux pays comme la Thaïlande, la Cisjordanie, le Kosovo, le Rwanda, la Bosnie, ou encore l’Afghanistan. De 1986 à 2001, il est membre de la célèbre agence Magnum fondée par Robert Capa et Henri Cartier Bresson, qu’il quitte pour créer l’Agence VII. Mais en août 2011, il annonce son départ.

James Nachtwey, 1993. Sans Titre© James Nachtwey, Sans titre, 1993
James Nachtwey, Bosnia© James Nachtwey, Bosnia
James Nachtwey, Kabul Afghanistan 1966© James Nachtwey, Kabul Afghanistan, 1966
James Nachtwey, Japan Tsunami© James Nachtwey, Japan Tsunami
James Nachtwey, Indonesia© James Nachtwey, Indonesia, A beggar and his family, 1998

Malgré une maîtrise de la couleur, le photographe utilise majoritairement le noir et blanc, un choix émotionnel qui semble s’imposer à lui et qui colle parfaitement à l’atmosphère des sujets choisis. Le noir et blanc permet d’aller directement à l’essentiel, alors que la couleur semble parfois détourner notre regard du sujet principal de la composition. Le photographe peut alors se concentrer davantage sur le cadrage, l’angle de vue et surtout l’instant photographié. Toutes ses photographies sont soigneusement composées et présentent une parfaite orchestration du chaos qu’il découvre à chaque périple. L’artiste déclare : « Quoi faire de ma colère. Je devais l’utiliser, canaliser son énergie, la transformer en quelque chose qui clarifierait ma vision, au lieu de l’embrumer ».

La photographie chez James Nachtwey est bien plus qu’un métier, c’est une véritable passion. Collègues et proches décrivent sa pratique photographique comme une obsession dévorante. Même après la prise de vue, le photographe passe des heures à retoucher la qualité de ses photographies. Aucune images n’est « falsifiée », mais afin d’obtenir le meilleur rendu possible pour décrire ce qui s’est déroulé, James Nachtwey modifie les niveaux de lumière et de saturation. La plupart de ses photographies sont à hauteur des yeux, afin que le spectateur se sente plus présent dans la scène.  Les images de James Nachtwey font à présent parties de la conscience collective. Le photographe réussi à fixer un visage humain sur des problèmes qui de loin peuvent paraître totalement abstraits. Chacune de ces images se présente telle une icône qui résume parfaitement le conflit du pays qu’il découvre.

James Nachtwey, Sans Titre© James Nachtwey, Sans Titre
James Nachtwey, Kosovo© James Nachtwey, Kosovo
James Nachtwey, Sudan, 1993 - Famine victim in a feeding center© James Nachtwey, Sudan, Famine victim in a feeding center, 1993
James Nachtwey, Rwanda© James Nachtwey, Rwanda, Survivor of Hutu death camp, 1994

Le charismatique James Nachtwey aime l’ordre et la discrétion, approchant au plus près des zones de conflits. « Je veux que le premier impact, et de loin, l’impact le plus puissant, soit une réaction émotionnelle, intellectuelle et morale sur ce qui arrive à ces personnes. Je veux que ma présence soit transparente. » L’image du film « War Photographer », documentaire sur James Nachtwey, est saisissante. Elle présente un contrechamp qui montre à quel point le photographe peut être proche de l’action. Il est sans aucun doute le successeur du célèbre précurseur du photojournalisme Robert Capa. James Nachtwey parcourt le monde, sac à dos et appareils photos impeccablement rangés. Il fut multi-honoré: à savoir deux fois le prix World Press Photo, cinq fois le Prix Robert Capa Gold Medal, trois fois l’Infinity Award, six fois nommé aux Etats-Unis photographe de magazine de l’année, le Prix W. Eugene Smith et le Ted Prize, pour n’en citer que quelques uns.

James Nachtwey, War Photographer© James Nachtwey, War Photographer

Il n’y a pas de travail plus risqué et plus mal payé que reporter de guerre. De nombreuses personnes critiquent le genre du photojournalisme tandis que d’autres saluent le génie et les œuvres de James Nachtwey. Cependant, le photographe ne voit pas ses pièces comme des œuvres d’arts mais comme des fragments de douleur: une souffrance sur la vie quotidienne des gens ordinaires. Son travail ne se situe pas dans le voyeurisme mais dans l’humanisme. James Nachtwey, durant ses années de pratique, découvre que ces quelques photos peuvent parfois changer non seulement la vie de ceux qu’il photographie mais aussi la vie de ceux qui observent ses clichés. Un ensemble photographique percutant pour comprendre que la paix est un combat de tous les instants.

James Nachtwey, Somalia 1992© James Nachtwey, Lifting a dead son to carry hom to a mass grave during the famine Somalia, 1992
James Nachtwey Afghanistan© James Nachtwey Afghanistan, Mourning a brother killed by a Taliban rocket, 1996
James Nachtwey, Sans Titre© James Nachtwey, Sans Titre 1
James Nachtwey, Chechnya© James Nachtwey, Chechnya, Ruins of central Grozny, 1996