C’est l’histoire de la chair, de ce qui reste. Des peaux vidées qui se réveillent sur ce qui hier encore était un champ de bataille. On imagine aisément une mise en scène accompagnée de fumée. C’est qu’Elodie Wysocki observe les ravages que produit la vie. Elle les traduit.

 « Mon travail pose la question du corps, le nôtre, celui des autres et le corps comme matière. Autour de cet axe central, je développe les notions d’identité, d’individualité et de temporalité. Ce qui m’intéresse c’est autant le “je” que le “nous”. On trouve d’ailleurs de nombreux allers-retours de l’un à l’autre, de l’un au tous, et son contraire. »¹

¹Préface de l’artiste

Elodie Wysocki, Diptera, 2011, copyright ewysockiElodie Wysocki, Diptera, néon sur aluminium, 80 x 80cm,  2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Memento Mori #2, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Memento Mori #2, paraffine, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Memento Mori #2, détail, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Memento Mori #2, paraffine, détail, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Memento Mori #1, 2011 , copyright ewysocki Elodie Wysocki, Memento Mori #1, mousse, tissu, bois, détail, © ewysocki
Elodie Wysocki, Memento Mori #1, détail, 2011 , copyright ewysocki Elodie Wysocki, Memento Mori #1, mousse, tissu, bois, détail, 2011 , © ewysocki
Elodie Wysocki, Memento Mori #1, détail, 2011 , copyright ewysockiElodie Wysocki, Memento Mori #1, mousse, tissu, bois, détail, 2011 , © ewysocki

Le geste est pointilleux, l’artiste travaille le détail. À l’image de l’archéologue qui, lorsqu’il excave les restes momifiés de nos ancêtres, doit s’attacher à lire dans les nervures de la terre l’histoire de ce corps qui n’en est plus un, Elodie Wysocki travaille dans les plis du réel, à la recherche d’une vérité qu’elle pourrait faire sienne. Ses créations questionnent ce corps qui est à la fois immuable (il est notre entité) et insaisissable (il change à chaque instant) – en évolution constante, cellule par cellule, jusqu’à n’être plus qu’un squelette: son état le plus figé. Et, quand Elodie Wysocki s’empare de ce sujet, elle le traite avec toute la sensibilité nécessaire à son évocation: amas de crânes en paraffine et tissus sur bois. Ses sculptures-accumulations ont la douceur du souvenir. On parle ici bien évidemment des grands charniers de l’Histoire Universelle mais aussi, et peut être même plus, de ceux de nos histoires personnelles. C’est qu’il est question de nostalgie, de ce sentiment doux-amer qui nous accompagne après la perte de nos proches et après l’autre mort, la plus petite, celle de l’instant à deux. Il s’agit de constater, dans tous les cas, notre condition d’êtres éphémères, sans prise aucune sur le passage du temps.

Elodie Wysocki, Darwin, détail, 2011, copyright ewysockiElodie Wysocki, Darwin, résine et fourrure, 180 x 80 x 15cm, détail, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Darwin, 2011, copyright ewysockiElodie Wysocki, Darwin, résine et fourrure, 180 x 80 x 15cm, détail, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Darwin, 2011, copyright ewysockiElodie Wysocki, Darwin, résine et fourrure, 180 x 80 x 15cm, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Cranes, 2011 , copyright ewysocki Elodie Wysocki, Crânes, coton, 80 x 60 cm, 2011 , © ewysocki

Pour rendre compte de cette emprise du temps, elle fait durer son geste, de façon à rendre compte de ces mutations. Le geste de la broderie, par exemple, appartient pleinement à cette démarche: il s’agit de faire émerger, au fur et à mesure, un objet dont la valeur première est celle de la patience de son créateur.

« Je m’intéresse beaucoup à la broderie, elle me permet d’inscrire dans mes images une temporalité: elle rend le temps visible. Ce travail interroge d’ailleurs la notion de temps. D’un coté il y a le temps du sportif; répétitif, laborieux, physique, et de l’autre mon temps de brodeuse; tout aussi répétitif, méthodique et obsessionnel. Dans notre société les corps doivent être magnifiés, totalement maitrisés, soumis, et ne doivent en aucun cas porter les marques du temps qui passe. Les corps des bodybuildeurs sont travaillés à l’extrême, ils sont poussés au delà de l’humain, devenus presque mutants par les gestes faits et refaits, ils restent pourtant et malgrès tout, des corps programmés pour se dégrader. « 

Figurer le corps, le questionner jusqu’à le faire disparaître, interroger l’ensemble du vivant – la quête de l’artiste n’a pas de fin. Il s’agit toujours d’interpeller le regardeur, de le faire réagir et de l’inclure dans un univers en marge, celui où l’on se souvient et où l’on prend conscience de notre nature éminemment charnelle.

Elodie Wysocki, Bodybuilders, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Bodybuilders, coton, 30 cm, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Bodybuilders, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Bodybuilders, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Bodybuilders, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Bodybuilders, coton, 30 cm, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Catcheurs, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Catcheurs, coton, 30 cm, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, Catcheurs, 2011, copyright ewysocki Elodie Wysocki, Catcheurs, coton, 30 cm, 2011, © ewysocki
Elodie Wysocki, portraits 1 2011Elodie Wysocki, portraits #1 2011 papier canson sur caisson lumineux 75 x 95x 15 cm ©
Elodie Wysocki, portraits 1 2011Elodie Wysocki, portraits #1 2011 papier canson sur caisson lumineux 75 x 95x 15 cm ©
Elodie Wysocki, portraits 1 2011Elodie Wysocki, portraits #1 2011 papier canson sur caisson lumineux 75 x 95x 15 cm ©
Elodie Wysocki, portraits 2 2011Elodie Wysocki, portraits #2 2011 papier canson sur caisson lumineux 55 x 50 x15 cm ©
Elodie Wysocki, portraits 2 2011Elodie Wysocki, portraits #2 2011 papier canson sur caisson lumineux 55 x 50 x15 cm ©